Messages : 515 Avatar : Toby Regbo Pseudo : Summer Child (Coralie) Copyright : Ti (ava) Ziggy Stardust (signa)Occupation : Maton des cartographes, vous savez, les types qui sont derrière et qui décodent le charabia des coureurs. Inventaire : Un vieux carnet à la couverture de cuir, rempli de notes, gribouillis et portraits des Blocards. Un crayon solide et tout-terrain, qui porte les marques des doigts de son possesseur.
(#) Sujet: [Divergent] Condamnés (Percy) Jeu 16 Avr - 17:19
Condamnés
Percy Wombley feat. Jaime King
Toujours ensemble, tel est notre destin. Nous avons beau lutter contre, il est écrit quelque part que nous allons nous gâcher la vie durant toute notre existence.
C’était le grand jour, tant espéré et enfin arrivé. La cérémonie du choix. Celle qui me ferait appartenir à ma vraie faction. La veille, les tests m’avaient révélé ma vraie nature : un Erudit. Je ne m’étais jamais vraiment senti à ma place, parmi les Fraternels, et maintenant je savais pourquoi. Je devais mettre mon intelligence au service de notre nation, au lieu de la pourrir à cultiver des légumes. Oh, je ne méprisais pas les miens, au contraire ! Il fallait des gens comme eux pour nous nourrir, pour l’équilibre de notre monde. Mais moi, je n’étais pas fait pour ça. En plus, j’étais loin d’avoir la main verte.
Et puis, changer de faction, ça voulait aussi dire changer d’habitation. J’allais perdre tout contact avec ma famille, ça me faisait peur, mais en même temps m’excitait. Et quelque chose me rendait infiniment heureux. Parmi cette foule de séparations que j’allais devoir subir, l’une d’entre elles était pour moi une vision des plus plaisantes. En effet, j’allais devoir dire au revoir à ma chère petite voisine. Heather Wombley, jolie blonde à la figure d’ange, qui faisait le ravissement de ses parents et des miens. Mon enfer personnel. Parce qu’elle, elle était gentille, parce qu’elle, elle était exemplaire, parce qu’elle, elle savait tout faire. Eh bien qu’elle reste les mains dans le terreau, je lui souhaitais une belle vie ! Moi, j’allais me rendre dans ces grandes tours d’ivoire et faire avancer les recherches. J’allais être un Erudit.
Depuis l’enfance, elle et moi étions en compétition. Quand est-ce que ça avait commencé, je ne m’en souvenais plus très bien et je crois qu’elle non plus. Toujours est-il qu’elle et moi, nous ne nous étions jamais entendus. Un chien et un chat dans une même pièce, qu’est-ce que ça fait ? Un sacré tapage, moi je vous le dis. Depuis notre plus jeune âge, je tirais ses couettes et elle m’appelait Boucle d’or. Depuis peu, je saccageais sa réputation en la traitant de sainte Nitouche glaciale, tandis qu’elle médisait de moi et mes conquêtes. Seize années passées à nous chamailler, disputer, crêper le chignon, hurler dessus, faire des coups fourrés… Je soupirai en pénétrant dans la Ruche, salle du vingtième étage de la Willis Tower. Dans quelques minutes, une heure tout au plus, je serais débarrassée d’elle et je pourrais me faire une nouvelle vie, sans son ombre pour me la gâcher.
Alors que tous les jeunes du pays se rassemblaient dans cette énorme salle, je laissais mon regard parcourir la foule. Soudain, je vis Heather entrer, talonnée de ses parents. Je plissais des yeux en la regardant monter, puis s’installer devant moi. Je mâchouillai ma lèvre, contrarié. Dans peu de temps, je n’aurais plus à souffrir de sa présence.
Le maître de cérémonie commença son discours, que je n’écoutai qu’à moitié. Je n’aimais pas énormément ce genre d’événements, et surtout j’avais hâte d’être enfin débarrassé d’elle. C’était quand même énorme ! Mon dégoût d’elle passait devant mon amour pour mes parents !
Alors que le maître de cérémonie prononça son nom, je la regardai se lever et se diriger vers l’estrade.
(∆∆∆) knowledge is the only logical solution to the problem of conflict.
Un tresse. Une simple tresse. Lâche, en désordre, tombant sur ton épaule droite. La dernière que tu feras devant le miroir de ta maison en bois, chez les Fraternels. Faction que, si tu décidais de faire confiance au tests que tu avais fait la veille, tu quitterais dans plus d'une heure. Mais tu allais leur faire confiance, à ces foutus tests. Tu ne veux pas rester. Tu ne l'aimes pas, cette faction. Trop de bonheur, trop de soleil, trop de nature, trop de sourire. Tu aimais tes parents, tu aimais tes amis, mais cet endroit, tu n'en pouvais plus. Non, tu avais besoin de ces tours d'ivoire et de verre, de ces tenues bleues, et de toute cette science et de ce savoir qui volaient au-dessus des têtes des Érudits. Érudits. Voilà où tu irais. Tu quitterais ceux que tu aimais pour faire ce que tu voulais. Ca faisait plusieurs années que tu lorgnais sur les membres de cette faction, que tu enviais presque autant que celle des Sincères. Et ce test, qui te guidait vers la voie du savoir, tu ne pouvais pas lui être autre chose que reconnaissante, malgré tout. Tu les avais remarqués, ta capacité à tout voir et ton cerveau cartésien. Et tu en avais conclu depuis longtemps que la couleur qui t'airait le mieux, c'était le bleu.
Les Wombley furent parmi les derniers à entrer dans la Ruche, où tous les jeunes de Chicago se pressaient comme des abeilles autour d'une fleur. Les conversations se fondaient, bourdonnant dans la pièce énorme. Tu jetais un regard vers la partie orangée de l'hémicycle, la partie de ta faction, et ton presque sourire s'effondra quand tes yeux s'arrêtèrent sur un visage que ty ne connaissais que trop bien. Daniel. Cet abruti sur pâtes, ce coureur de jupons, ce bouclé qui t'avais mené la vie dure pendant seize longues années. Impossible pour vous de bous éviter, vos parents s'entendaient à merveille, là où vous ne pouviez pas rester dans la même pièce plus de deux minutes avant de vous sauter dessus, plus jeunes, où vous assassinez à coup de mots, désormais. Tu ne lui adresses qu'un regard noir, sans vraiment être sûre qu'il le remarque. Tu t'en fichais. Tu n'avais pas besoin de lui rappeler ce qu te pensais de lui. Vous rejoignez tous les trois les sièges que vous aviez remarqués et, quelques minutes plus tard, la cérémonie commence. Ce discours, tu l'avais attendu, mais tu ne l'écoutais pas. Tu ne faisais que te réjouir. Tu serais les mains de tes parents, et tu souriais à l'idée que tu ne reverrais plus jamais les boucles de ton infernal voisin. Adieu, Daniel. Amuses-toi bien avec tes arbres et la joie de vivre ambiante. Le maître de cérémonie, un leader Sincère cette année, commence l'appel. Et, après que plusieurs personnes aient déjà versé leur sang sur la faction qu'ils désiraient, tu déglutissaient à l'idée d'être la première transfert de l'année. La première à décevoir tes parents. La première à écouter tes choix. Ton nom résonne, et tu sens le regards de King te brûler la nuque. Tu murmures à tes parents que tu les aimes, descends les marches jusqu'à l'estrade. Tu attrapes le couteau que le Sincère te tends, le remercie par un sourire, t'approche des coupes. Tu jettes un regard sur la terre de ta faction, et sur l'eau des Érudits. Et finalement, tu entailles ta paume, et laisse un goutte rouge s'écraser sur la surface limpide du liquide clair. Tu regardes le sang la rendre écarlate, et tu souris lorsque le mot Érudite flotte au-dessus de la Ruche, et que le côté bleu de l'hémicycle s'agite et applaudit. Tu lisse le devant de ta robe rouge clair et t'avances vers les savants. Vers les tiens.
Jaime King
SUBJECT A5 : THE SKETCHER
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Toujours ensemble, tel est notre destin. Nous avons beau lutter contre, il est écrit quelque part que nous allons nous gâcher la vie durant toute notre existence.
Je la regardai descendre les gradins pour se diriger vers le centre de l’hémicycle. Comme au ralenti, elle passa devant le maître de Cérémonie à qui elle adressa un sourire avant d’attraper le couteau qu’il lui destine. Je remarquai mentalement que ce n’était pas vraiment sain de tous utiliser le même couteau, même s’il y avait désinfection entre chaque candidat. L’idée d’avoir le même outil qu’Heather entre les mains pour entamer ma chair, comme elle venait de le faire, me dégoûtait. Même s’il y avait une désinfection… je détestais ça. Cela restait tout de même un passage obligé et je me fis une raison De là où j’étais installé, je vis sa main hésiter entre la terre de notre faction et… et l’eau des Erudits ! Comment ça ! Elle n’allait quand même pas…
Un tonnerre d’applaudissements fit rage du côté bleu, et je compris avec exaspération qu’elle avait eu les mêmes résultats aux tests que moi. Qu’elle aussi, était faite pour porter le bleu et pour faire marcher ses méninges. Evidemment. Elle et moi avions beau nous détester cordialement et être aussi différents l’un de l’autre qu’il était humainement possible, elle était la seule capable d’entretenir une joute verbale des plus animées avec moi. Et au fond de moi, je savais qu’elle non plus n’était pas faite pour faire partie des Fraternels : son esprit était trop aiguisé pour passer ses journées les mains dans la terre. Je la regardai monter rejoindre les rangs des Erudits, comme le faisaient ses parents. Un sanglot de sa mère me fit baisser les yeux sur eux : ils venaient de perdre leur fille et c’était sans doute la dernière fois qu’ils la voyaient. La main de ma mère vint presser mon bras, comme pour se rassurer, comme si elle savait que moi aussi j’allais les quitter pour rejoindre la faction à laquelle j’appartenais réellement. Le regard que nous échangeâmes, elle et moi, fut sans doute le plus intense que nous n’avions jamais eu. Dans ses prunelles céruléennes, dont j’avais hérité, je lus toute l’amour qu’elle me portait et toute la confiance qu’elle avait en moi. Je me demandais souvent comment elle et mon père, si Fraternels, avaient fait pour élever un enfant aussi turbulent que moi… Sans doute grâce à l’amour incompréhensible qu’ils avaient pour leur progéniture. Je fis glisser ma main sur celle de ma génitrice, la serrai. Moi aussi je t’aime, maman.
Un autre transfert se fit, cette fois des Altruistes vers les Sincères. Ma lettre arrivait bientôt. Je pestai encore intérieurement de devoir la rejoindre sur le même banc. Elle m’avait ruiné une partie de mon plaisir ! La seule motivation que j’avais à présent, c’était celle de voir son visage se décomposer lorsqu’elle verrait qu’à mon tour, j’aurais choisi la coupelle d’eau où déposer mon sang. Lorsque vint mon nom fut appelé, je me levai dignement et descendit pour rejoindre l’estrade. Un dernier regard en direction de mes parents et je pris le couteau que me tendit le maître de cérémonie (non, vraiment, question hygiène on peut faire mieux les gars, revoyez votre organisation). Sans aucune hésitation, je me tranchais la paume d’un geste vif et portais mon poing au-dessus de l’eau. Une goutte de sang vint la colorer. Avec satisfaction, j’entendis ma nouvelle faction proclamer mon arrivée. Les yeux rivés dans ceux de ma rivale de toujours, je grimpais pour rejoindre les bleus, un sourire victorieux étirant mes lèvres. Je me glissai à côté d’Heather puis me penchai discrètement vers son oreille pour lui chuchoter : « Il semblerait qu’on soit condamnés à être ensemble, ma belle. »
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Tu désespérais d'attendre qu'un autre choisisse de quitter sa faction d'origine pour celle à laquelle il appartenait vraiment. Alors que le maître de cérémonie remontait les lettres de l'alphabet, une pense vint te nouer la gorge. Et si tu étais la seule transfert de ta génération ? La seule à briser le coeur de tes parents, la seule à suivre tes instincts ? Tu savais que beaucoup de jeunes préféraient ne pas changer de faction malgré des résultats de tests d'aptitudes. Que même si Faction before blood résonnait dans la Ruche à chaque cérémonie du Choix, la plupart décidait de ne pas suivre ce mantra. Surtout les Fraternels et les Altruistes, qui pensaient d'abord aux intérêts des autres. La seule transfert, une Fraternelle ? Tu craignais l’étiquette que les Érudits te colleraient bientôt sur le front. Tu craignais ne jamais devenir l'une des leurs. Mais tu te remémorais leurs applaudissements, leurs sourires, et tu te sentis tout de suite plus rassurée. Un jeune homme du nom de Lance, tout de gris vêtu, s'avança vers les coupelles, mais c'est vers les noirs et blancs qu'il se rendit ensuite. Quoi ? Deux transferts, une Fraternelle et un Altruistes ? Etrange, étonnant, et encore plus du côté Altruiste. Les expressions de leurs visages montraient à quel point ils étaient surpris. Les transferts Altruistes étaient le plus rares - d'après les statistiques que tu avais lues.
Un nouveau nom fut crié, et tu te redressas sur ton banc, à la recherche de celui que l'on venait d'appeler. Daniel King. Il est là, il descend les marches, monte sur les marches, et la simple pensée que tu ne reverras plus jamais ses traits te comble de joie. Tu pensais au fait de te réveiller le matin sans qu'il y soit pour quelque chose, à pouvoir marcher sans risquer de lui tomber dessus, alors que le mot Érudit fut à nouveau lancé à plein poumons. Quoi, Daniel était déjà parti ? Tu le vis se tourner vers le côté bleu - vers ton côté - et tu compris. Tu aurais dû comprendre plus tôt. Tu aurais dû savoir qu'il ne resterait pas chez les Fraternels à cultiver des légumes et sourire à tout bout de champ. Non. Daniel, il réfléchissait, il pensait, il savait. Evidemment qu'il était un Érudit. Tu lui adressais dix secondes d'applaudissement, absolument pas dynamiques, et il vint s'asseoir à côté de toi. Parfait. Tout ce dont tu avais besoin. Il avait l'air heureux. Quoi de plus normal. Il allait là où il voulait, et en plus de ça, il pourrait continuer à te taper sur les nerfs jusqu'à ce que la mort vous sépare. Tu le sens se pencher un peu vers toi, et tu fais tout ton possible pour ne pas tourner la tête. Ma belle. Tiens, c'était nouveau, ça. Alors tu ris. Il allait te rendre folle. « Juste le temps de la formation. Avec un peu de chance, j'aurais plus à t'avoir dans les pattes après ça. Dieu soit loué. »
Jaime King
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Messages : 515 Avatar : Toby Regbo Pseudo : Summer Child (Coralie) Copyright : Ti (ava) Ziggy Stardust (signa)Occupation : Maton des cartographes, vous savez, les types qui sont derrière et qui décodent le charabia des coureurs. Inventaire : Un vieux carnet à la couverture de cuir, rempli de notes, gribouillis et portraits des Blocards. Un crayon solide et tout-terrain, qui porte les marques des doigts de son possesseur.
Toujours ensemble, tel est notre destin. Nous avons beau lutter contre, il est écrit quelque part que nous allons nous gâcher la vie durant toute notre existence.
Je goûtai à l’expression que j’avais suscitée sur son visage : choquée, surprise, presque en colère. Comme je l’avais été alors qu’elle faisait tremper son sang dans la coupelle des Erudits. Finalement, le fait d’être dans la même faction qu’elle devrait être amusant. Il fallait un peu m’amuser pour compenser le fait que je n’étais pas le seul Fraternel capable d’entrer chez les Erudits cette année. Car oui, je l’avais un peu sec qu’elle aussi puisse porter la tenue bleue. Entre Heather Wombley et moi, ça a toujours été de la concurrence pure, un besoin de faire mieux que l’autre dans tous les domaines, qu’importe ce qu’ils soient. Planter le plus rapidement son paquet de graines de tournesol ? Fait. Ramener au camion le plus de chou-fleur ? Fait. Equeuter le plus de haricots possible dans un temps limité ? Fait. Ramener les meilleures notes, faire des courses de vélos pour rentrer de l’école, faire gagner son équipe en sports collectifs, être à la tête du projet choisi par l’instituteur… Depuis touts petits, je vous dis. Tout pouvait sujet à cette émulation pas très très saine du tout. En fait, ça virait un peu à l’obsession.
Plus j’y regardais et plus ça me plaisait qu’elle aussi soit chez les Erudits, que l’on puisse continuer notre jeu. Je ne savais pas ce qu’elle en pensait, certainement était-elle moin enthousiaste que moi à cette idée. Je la sentais tendue à mes côtés, comme un arc prêt à lancer sa flèche. La fin de la répartition arriva bientôt, et nous étions moins d’une dizaine nouveaux transférés chez les Erudits. La Ruche se vida, et nous nous fîmes un chemin derrière celui qui nous menait, nouveaux Erudits, à notre désormais maison. J’étais toujours près d’Heather, la dépassant d’une demi-tête. Sa tresse se balançait sur son épaule au rythme de ses pas, tandis que nous prenions le chemin des bus. Les Erudits avaient prévu pour nous transporter un grand bus bleu flambant neuf. En chemin, l’homme sans doute chargé de notre apprentissage nous appris qu’il fonctionnait avec un carburant spécial élaboré dans les laboratoires des Erudits, que nous avions la chance de poser nos fesses dans ce prototype qui bientôt équipera toute la ville dans quelques mois. J’hochai la tête, captivé par les explications mécaniques qu’il donnait de la machines, complétées par les détails chimiques de la composition du carburant et sa manière d’agir sur le système. Ce discours pouvait paraître ennuyeux, mais pour moi, il n’était qu’une simple chose : la confirmation que j’appartenais à la bonne faction. Un à un nous rentrâmes dans le bus, et nous nous installâmes sur les confortables sièges, eux aussi fabriqués avec un matériau révolutionnaire déjà utilisé dans les voitures de luxe, mais qui tendait à se démocratiser. J’étais impressionné par tout l’attirail de technologie qui s’étalait dans ce simple bus, et je n’avais pas assez de mes yeux pour observer tout ce qui se passait autour de moi. J’en vins même à me pencher vers ma voisine pour lui chuchoter : « Toi aussi, tu trouves ça bizarrement passionnant ? » J’avais l’étrange besoin de me rassurer, de trouver quelqu’un avec qui partager ces découvertes gigantesques. Je changeais complétement de décor et aussi paradoxal que ça puisse paraître, Heather était la seule personne qui pouvait me comprendre.
(#) Sujet: Re: [Divergent] Condamnés (Percy) Dim 3 Mai - 16:30
(∆∆∆) knowledge is the only logical solution to the problem of conflict.
Depuis votre plus jeune âge, vous ne faisiez qu'essayer de faire mieux que l'autre. Tous ces défis, concours et compétitions que vous vous lanciez à longueur de temps, sous le regard d'abord amusé, plus las, de vos parents. C'était devenu une part entière de vos vies, au fil du temps. Démonter l'autre un maximum. Lui montrer que rien de ce vous pouviez vous dire ou vous faire ne vous atteignait plus que ça. Même si, pour ta part, tu t'étais déjà retrouvée un petit peu plus qu’irritée. Daniel n'avait pas de limites. Et s'il en avait, il ne les avait pas encore atteintes. Tu lui laissais d'ailleurs souvent le dernier mot, quand tu sentais que les prochaines paroles qu'il prononcerait te seraient presque fatales. Et toi qui avait cru pouvoir te réjouir en choisissant une nouvelle faction, un nouveau chez toi, qui correspondrait tellement plus à qui tu étais. Tu aurais du te douter que ton diabolique voisin ferait de même. Ça ne lui allait pas, le terreau et le bonheur perpétuel. Pas plus qu'à toi. Parce qu'au final, si vous vous cherchiez si souvent, c'était bien parce que vous vous ressembliez plus que vous ne le pensiez. Vous vous suiviez, en fin de compte.
La cérémonie du Choix prit bientôt fin, et tu constatais que peu des transfert de cette année avaient choisi les Érudits comme nouvelle faction. A ton plus grand désarroi. Tu n'avais plus beaucoup de raisons pour t'éloigner de King le plus possible, désormais. Vous étiez les deux Fraternels, les deux seuls à se diriger vers les bus nouvelles technologies des Érudits alors que vous portiez encore vos tenues rouge et orangée. Même si les Altruistes étaient les transferts les moins acceptés par leurs nouveaux camarades, on ne pouvait pas dire que les Fraternels soient véritablement appréciés des jeunes de votre âge. Vous étiez bien pratiques, avec vos cultures et vos jolis mots. Mais votre amour de la vie en énervait plus d'un. Et inexplicablement, tu n'arrivais pas à te résoudre à t'éloigner de ton ennemi de toujours. Tu avais la désagréable impression que vous alliez devoir compter l'un sur l'autre, dans les prochains jours, voire les prochaines semaines. En attendant de s'intégrer un petit peu, du moins, ce qui ne serait peut-être pas la tâche la plus aisée, en ce qui te concernait. Vous marchiez tous à peu près à la même allure, écoutant attentivement les informations que votre guide, et très certainement votre formateur, vous communiquait au sujet des bus que vous alliez emprunter pour rejoindre votre nouvelle faction. Vous n'aviez pas choisi les bleus pour rien : sur tous les visages des transferts, tu pouvais lire un mélange de bonheur, de satisfaction et de fascination. Les natifs se contentaient de marcher, alors que vous étiez pendus aux lèvres de l'adulte, opinant du chef à chacune de ses affirmations. Bientôt, vous y étiez assis, dans ce bus, sur des sièges extrêmement confortables. Tu jettes un regard au transfert Altruiste, qui n'a pas du tout l'air à l'aise. Tu balades tes pupilles noisette partout autour de toi, admirant la manière dont tous les matériaux étaient assemblés, toutes les choses que tu n'avais pas encore vues, t'émerveillant presque du fait que tu roulais dans un bus que rares avaient encore eu la chance d'emprunter. Du fait que des merveilles de technologies, tu risquais d'en créer, toi aussi. Du fait qu'un jour des transferts seront dans la même situation que la tienne à cet instant précis, que leurs yeux pétilleront d'admiration pour tes propres inventions. Tu baisses les yeux vers Daniel alors que tu le vois se pencher vers toi. Vous vous étiez retrouvés assis l'un en face de l'autre, et tu ne l'avais même pas remarqué, bien trop occupé à contempler tout ce qui t'entourait. Tu hoches la tête à sa question, peinant à retenir un sourire qui en disait long. « Fascinant, même. Complètement fasciant. » Voilà où vous en étiez rendus, alors ? Après toutes ses années passées à se chercher, à ne vouloir rien d'autre que de terrasser l'autre dans n'importe quelle circonstance, vous deviez maintenant vous extasier sur les mêmes choses, vous rendre compte en même temps que c'était ici, votre vrai chez vous ?
Quelques minutes plus tard, sans que tu ne les aies vues passer, vous étiez de nouveau en train de marcher. Cette fois, ce n'était pas sur e goudron typique des rues banales de la villes, celles qui n'appartenaient à aucune faction, mais bien sur les dalles en béton des trottoirs Érudits. Tu y étais. Enfin. Tu avais encore du mal à croire que demain, porter du rouge te serait interdit. Tu regardais tout à la manière d'une enfant qui découvre le monde. Les gens étaient beaux, droits, leurs appareils de pointe dans les mains. Les discussions qui t'entouraient étaient, pour certaines, incompréhensibles, mais tu reconnaissais parfois des termes que tu avais déjà croisés dans tes livres. Et puis, un peu plus loin, se dressait une grand dôme de verre, dont les morceaux étaient maintenus par des barres de ce qui semblait être de l'acier. Chaque centimètres du bâtiment passaient au crible de ta rétine, alors que tu repensais aux habitations en bois, certes vastes, mais sommaires, de ton ancienne faction. A tes yeux, ce dôme tenait plus du chef d'oeuvre que de la banale construction. A tel point que tu ne pus retenir un léger coup de coude dans les côtes de Daniel, toujours à côté de toi. « Regardes-moi ça. Sérieux, c'est pas de la magie, tout ça ? »
Jaime King
SUBJECT A5 : THE SKETCHER
Messages : 515 Avatar : Toby Regbo Pseudo : Summer Child (Coralie) Copyright : Ti (ava) Ziggy Stardust (signa)Occupation : Maton des cartographes, vous savez, les types qui sont derrière et qui décodent le charabia des coureurs. Inventaire : Un vieux carnet à la couverture de cuir, rempli de notes, gribouillis et portraits des Blocards. Un crayon solide et tout-terrain, qui porte les marques des doigts de son possesseur.
(#) Sujet: Re: [Divergent] Condamnés (Percy) Mar 12 Mai - 21:11
Condamnés
Percy Wombley feat. Jaime King
Toujours ensemble, tel est notre destin. Nous avons beau lutter contre, il est écrit quelque part que nous allons nous gâcher la vie durant toute notre existence.
Ma voisine de toujours semblait être dans le même étant que moi. Ses yeux comme les miens regardaient tout, sans jamais pouvoir trouver quel était le coin du tableau le plus intéressant, sur lequel les poser. Nous fûmes menés à l’intérieur du quartier dédié à notre nouvelle faction, et le changement de décor fut des plus brutaux. Loin des champs des Fraternels, nous étions en plein cœur d’une forêt d’acier et de fer, et la cime de ces énormes arbres artificiels était presque invisible tellement elle était haute. Je me dévissai le cou pour regarder plus haut, toujours plus haut, vers le ciel que ces tour semblaient toucher. Peut-être que sur les toits de ces gratte-ciels, nous pourrions toucher les nuages… Un coup de coude entre mes côtes me fit sortir de ma rêverie. J’esquissa un sourire de gamin. « Ouais, je suis d’accord avec toi, c’est magique. » Jour à marquer d’une blanche croix, j’étais d’accord avec Heather Wombley ! Comme si plonger tous les deux dans ce monde inconnu et fantasmé nous rapprochait, nous deux, êtres si dissemblables. Et pourtant, sans doute nous nous ressemblions plus que nous le pensions…
Nos guides continuaient la visite, nous présentant les tours autour de nous. Tellement de noms, tellement de fonctions que j’en avais le tournis. Tellement loin de l’organisation de notre faction d’origine ! Les Fraternels avaient une organisation grégaire et archaïque à côté de ça ! Nous continuâmes à les suivre, rentrant dans un bâtiment dédié à notre formation, nous autres originaires d’une autre faction. C’était essentiel que nous puissions rapidement rattraper nos congénères, afin d’être opérationnels le plus tôt possible. Le travail était essentiel ici, le travail et le génie. C’était pour déterminer si nous avions le génie nécessaire à cette faction que nous étions testés. Je déglutis. J’avais toujours été sûr de moi, jusqu’à présent, mais si… je devenais l’un de ces sans-faction, condamné à vivre de la gratitude des Altruistes ? Je voulais cette faction, mais si cette faction ne voulait pas de moi ? Plus j’écoutais notre futur formateur et plus l’anxiété montait en moi. Je me mis à mâchonner l’intérieur de mes joues, jusqu’à m’en faire saigner. Je devais absolument avoir une place ici.
Notre formateur nous indiqua la direction des dortoirs communs, et avec un dernier sourire qui ne me rassura pas du tout, il nous laissa. Je tentai de rire pour laisser l’angoisse s’échapper de mon corps, alors que nous prîmes le chemin de nos quartiers. « Alors, c’est demain que commence le grand jeu ! J’espère que t’es prête, petite Heather, je serais déçu de ne plus t’avoir dans les pattes ! » Peut-être que notre compétitivité légendaire nous aiderait à nous surpasser et à gagner une place dans ces tour de cristal. C’était en tout cas ce que j’essayais de me dire alors que nous avancions l’un à côté de l’autre. Avec surprise, j’en venais même à espérer que nous soyons tous les deux bel et bien condamnés à nous supporter toute une vie.
(#) Sujet: Re: [Divergent] Condamnés (Percy) Ven 15 Mai - 15:18
(∆∆∆) knowledge is the only logical solution to the problem of conflict.
Je suis d’accord avec toi. Wow. Alors ça, tu ne t’y attendais pas. Jamais, mais alors jamais, Daniel King et toi n’avaient été d’accord. Vous aviez passé les seize dernières années de votre vie à chercher la petite bête dans les propos de l’autre, prenant un malin plaisir à faire s’effondrer le moindre petit développement qui tenait debout. Un exposé mal ficelé. Une plante mal entretenue. Un vêtement mal porté. Tout portait lieu à la critique et à l’amélioration, chez vous. Mais là, non. Là, vous tombiez d’accord, pour la deuxième fois. Tu avais validé l’aspect passionnant des explications de votre formateur, et lui la magie qui semblait émaner de la moindre petite chose. Tu avais étudié les Érudits de manière assez assidue pour savoir qu’ils avaient pour habitude de dire que la connaissance était la seul solution logique aux conflits. Et tu pouvais constater, et ce après seulement quelques minutes passées chez eux, qu’ils avaient parfaitement raison. Il t’était arrivé, quelques infimes fois, de te demander si Daniel et toi pouviez être amis. Tu avais inconsciemment cherché des moyens pour faire cesser le feu. Et il était là, devant toi. Le savoir. Il avait, en un temps éclair, réussi à vous faire vous entendre. Légèrement. Après tout, ça ne faisait que commencer. Ce même savoir avait encore le temps de vous diviser encore un peu plus. Et ça, seul l’avenir vous le dira. Mais tu te surprenais à vouloir faire des efforts. Vous vous retrouviez tous les deux en pays inconnus, les deux seuls Fraternels à devoir rattraper les natifs Érudits. Et vous alliez fatalement devoir vous serrer les coudes.
On continue de vous faire vagabonder dans les méandres qui constituent ta nouvelle faction, et toi-même sait que tes yeux doivent scintiller, tant tu es émerveillée. Tu n’arrivais toujours pas à te faire au fait que c’était bien réel, que tu avais quitté la terre pour l’acier, la gentillesse pour le génie. Que plus jamais tu n’aurais à sourire à la vie à chaque fois qu’on te le demandait, le matin, en te servant ton petit-déjeuner. On ne te le demanderait plus. On ne t’imposera plus que de savoir, et c’était, à tes yeux, la meilleure chose que l’on puisse t’imposer. Tu n’en pouvais déjà plus d’attendre, attendre qu’on te laisse porter du bleu, qu’on te laisse pénétrer dans ces laboratoires qui t’avaient tant fait rêver, qu’on te reconnaisse finalement comme une véritable Érudite. Que la connaissance devienne enfin ton arme la plus puissante. Tu sentais cependant que le chemin risquait d’être long, semé d’embûches. Embûches, pour certaines, semés par ton voisin lui-même. Il n’y avait aucune raison que votre petit jeu puéril s’arrêtait, alors que vous alliez devoir rester au même endroit pendant encore plusieurs mois. Tu lui jettes un regard, ne pouvait pas t’empêcher de remarquer une certaine angoisse : il se mord la joue, joue avec ses doigts, ne sourit plus autant que la minute précédente. Tu as presque envie de savoir ce qui se passe dans sa tête, mais tu ne cherches pas plus loin, alors que bientôt on vous fait entrer dans le bâtiment qui vous habitera tout le temps de votre initiation. La peur de l’échec. Tu l’avais déjà diagnostiquée chez Daniel. Et tu le comprenais. Si la faction que vous aviez choisie ne vous choisissait pas, vous, vous alliez vite vous retrouver aux abords de chez les Altruistes, votre vie ne dépendant plus que de leur pitié et leur générosité. Pas de quoi s’enchanter, en effet. Avant l’heure du déjeuner, on vous laissa prendre le chemin de vos dortoirs, mixtes, mais divisant les natifs des transferts. On vous demande de vous changer, de venir vous joindre au repas, et on vous informe que votre après-midi sera libre. Merveilleux. Tu allais pouvoir dévorer la bibliothèque. Vous marchez tous le long des couloirs, et très vite la voix de Daniel retentit. «Ma motivation pour réussir, c’est de me dire qui si j’y arrive, j’aurais tout le loisir de t’emmerder. Un maximum. » A la fin de la journée, vous étiez tous allongés dans vos lits, les yeux fermés, très vite endormis pour la plupart, vos vêtements bleus et blancs posés sur une chaise à côté de vos lits, prêts pour le lendemain. Le lendemain. Jour que tu attendais impatiemment.
Et, presque six mois plus tard, c’est avec enthousiasme et bonne humeur que tu lances ton coussin sur ton blond de voisin, toujours profondément endormi dans le lit à côté du tien.
«Debout gros tas. C’est l’heure de savoir qui de nous deux va se retrouver dehors. » C’était le jour des derniers tests. Ceux qui allaient déterminer votre avenir. Ceux qui allaient vous rendre officiellement membres de cette faction. Et, malgré la bonne humeur qui tu n’arrivais pas à cacher, tu étais plus anxieuse que jamais.
Jaime King
SUBJECT A5 : THE SKETCHER
Messages : 515 Avatar : Toby Regbo Pseudo : Summer Child (Coralie) Copyright : Ti (ava) Ziggy Stardust (signa)Occupation : Maton des cartographes, vous savez, les types qui sont derrière et qui décodent le charabia des coureurs. Inventaire : Un vieux carnet à la couverture de cuir, rempli de notes, gribouillis et portraits des Blocards. Un crayon solide et tout-terrain, qui porte les marques des doigts de son possesseur.
« Debout gros tas. C’est l’heure de savoir qui de nous deux va se retrouver dehors. » Je ronchonnai, levai une paupière pour la refermer aussitôt. « Gros tas, gros ta, t’as jamais vu un miroir, ma fille, ta fesse gauche et plus grosses que les deux miennes réunies. » Je me retournai entre mes draps, soupirai pour finalement me mettre debout. J’avais attendu ce jour. Je l’avais rêvé. Je m’y étais tellement préparé que j’en avais l’impression d’avoir fait ça toute ma vie. Les souvenirs de ma vie chez les Fraternels s’étaient estompés peu à peu, ne laissant que dans ma mémoire les visages trop souriants qui m’avaient toujours fait sentir mal à l’aise. Ma place n’était pas avec eux. Ma place était ici, dans ces locaux faits de verre et de génie. Je le savais depuis toujours. Mais aujourd’hui, il était temps de le prouver. Je dépassai ma voisine en lui fichant un coup de coude bien placé entre les côtes. Puis esquissai un merveilleux sourire, celui qu’elle ne peut pas supporter. Je n’avais pas perdu l’habitude de la taquiner, loin de là. Pire que ça, j’y avais pris goût. Avant, c’était toujours par ennui, à présent c’était une habitude coutumière bien installée depuis plusieurs mois. Nous vivions l’un avec l’autre, quasiment vingt-quatre heure sur vingt-quatre maintenant que son lit était voisin du mien. Je l’entendais respirer lorsque je ne trouvais pas le sommeil, et ce son m’était devenu familier. Aussi familier que le ton de sa voix lorsqu’elle répondait à mes piques. Aussi familier que de voir sa main se porter dans sa longue chevelure afin de l’attacher en un épais chignon, pour découvrir sa nuque qu’elle avait fine et blanche. J’avais fini par être à ses côtés aussi naturellement que cela ne me dérangeait absolument plus. Et pire, cela me faisait même plaisir…
Nous nous préparâmes dans un habituel concert de taquineries et autre joyeusetés. Je lui dis qu’elle a mauvaise haleine, elle me dit que mes cheveux ressemblent à… non, je vais pas le dire. De sa bouche, c’est plus poétique. L’intimité que nous avions était beaucoup plus étroite que je ne pouvais l’imaginer. Et, alors que nous suivons la cohorte afin de nous rendre dans l’amphithéâtre réservé à la promotion des jeunes générations, je ne pouvais m’empêcher de marcher près d’elle. A ma place, bizarrement. Qui aurait cru que six mois aurait pu nous changer à ce point ?
Qui aurait cru qu’après six mois, en rentrant dans l’amphithéâtre bardé de décorations aux couleurs bleues du génie, j’aurais eu envie de lui prendre la main pour éviter à la mienne de trembler ? Je n’avais pas vraiment peur, non, je m’étais préparé pour ce jour. J’étais prêt depuis toujours à rentrer dans cette caste qui était la mienne et je l’avais prouvé ces derniers mois. Tout comme Heather. L’un comme l’autre, nous avions été doués, seulement repris pour nos chamailleries incessantes. Nous n’avions aucune chance d’être recalés, si ?
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Il laisse apparaître une de ses iris bleus et un sourire se dessine malgré toi sur tes lèvres. Il s'élargit en un rictus moqueur alors que tu hausses un sourcil. « Mais c'est que tu m'observes, King ! » Tu n'attends pas qu'il se lève pour t'éloigner et commencer à fouiller dans tes affaires, sans aucune idée de ce que tu allais bien pouvoir porter sous ta blouse. Tu tiens une robe bleue nuit devant toi, inspecte les détails pour t'assurer qu'elle soit adaptés à la journée que tu allais passer, et tu sursautes alors que quelque chose tu heurtes les coudes. Un coude. Tu devines lequel, tu te tournes vers le coupable, lui adresse un regard aussi las qu'amusé, et lui adresse un majestueux doigt d'honneur alors qu'il arbore ce sourire que tu détestais tant. C'était devenu comme ça, entre toi et Daniel. Six mois avaient réussi à transformer seize ans de haine et de rivalité en une espèce de camaraderie bancale, plus ou moins sincère, bien que de plus en plus solide. Comme tu l'avais imaginé à votre arrivé chez les Erudits, vous aviez passé le plus clair de votre temps côtes à côtes. Les deux transferts Fraternels, les deux qui essayaient d'oublier les valeurs de leur ancienne faction, qui ne prenaient qu'une part infime dans celle de leur nouvelle. Il était fatal que vous vous retrouviez dans une situation pareille. Quoiqu'il en soit, tu étais surprise de ce que tu en pensais. Tu n'aurais pas cru pouvoir le supporter aussi longtemps. Mais il avait changé, Daniel. Il était plus silencieux, plus calme. Et surtout, beaucoup moins agaçant. Il lui arrive de ne rien dire pendant plusieurs longues, longues minutes alors que vous êtes assis l'un en face de l'autre, à la bibliothèque, en cours, à la cafétéria. Des occasions dont il aurait autrefois profité pour te lancer une pique, plus ou moins blessante. Mais non. Il ne te blessait plus. Il se contentait de te regarder dans le plus grand silence. Et par moment, cela t'effrayait.
Douze heures plus tard, vous étiez tous assis dans l’amphithéâtre. Au premier rang, les uns à côtés des autres, alors que les Érudits se tenaient derrière. Tu avais l'impression que la faction tout entière s'était réunie dans l'hémicycle pour assister à cette soirée. Celle que vous aviez tous attendu avec impatience. Tu promenais ton regard partout sur la salle, à la recherche de quelque chose qui pourrait t'indiquer si oui ou non, tu avais réussi. Il n'y avait honnêtement peu de chance pour que ce ne soit pas le cas. Sans aucune vantardise ou prétention, tu ne pensais pas avoir raté quoique ce soit. Tu étais doué. Vous l'étiez presque tous; Daniel l'était. Mais il n'était pas le plus rassuré. Tu le sentais crispé, sur le fauteuil à côté de toi, alors que chez lui aussi, ses iris couraient dans la salle. Tu souris, sans le vouloir, alors qu'on mèche de ses cheveux lui retombe devant ses yeux. Il avait l'air d'un gamin. D'un gamin apeuré. « Eh. C'est bon. Y a pas de raison pour que tu t'sois planté, Dan. » Tu attends qu'il tourne la tête vers toi pour lui sourire et reporter ton attention sur le leader Érudits qui entame son petit discours. Il allait bientôt commencer la liste de ceux ayant compléter l'initiation. Tu pinces les lèvres alors que la première lettre de ton nom de famille apparaît devant tes yeux. Tu serais dans les dernières. Si toutefois tu figurais sur cette foutue liste. Tu inspires un grand coup et écoute. Devant toi, le transfert Altruiste s'effondre alors qu'il s’aperçoit que son nom n'a pas été dit. C'était sa dernière soirée ici. Tu fermes les yeux. Te répètes que ça va aller, encore et encore. Tes cheveux te gênent, soudainement, alors tu les enroule entre tes doigts, t'apprêtant à en faire un chignon épais... Quand le nom de ton acolyte retentit dans la pièce. Tu tournes une nouvelle fois les yeux vers les siens, incapable de laisser tes cheveux s'en aller et tes bras retomber. Seule un sourire béat, heureux, presque fier déforme ton visage. Et tu te retiens de ne pas lui claquer un baiser sur la joue.
Jaime King
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Messages : 515 Avatar : Toby Regbo Pseudo : Summer Child (Coralie) Copyright : Ti (ava) Ziggy Stardust (signa)Occupation : Maton des cartographes, vous savez, les types qui sont derrière et qui décodent le charabia des coureurs. Inventaire : Un vieux carnet à la couverture de cuir, rempli de notes, gribouillis et portraits des Blocards. Un crayon solide et tout-terrain, qui porte les marques des doigts de son possesseur.
Assis à l’amphithéâtre à côté d’Heather, je serrais les dents en priant pour que le temps passe plus vite. Six mois que j’attendais ce joue et je n’en pouvais déjà plus. Qu’il finisse, que je sache, vite. Heather sembla deviner mon trouble, comme toujours. Elle était douée pour savoir ce qui se passait dans ma tête, je l’avais remarqué à plusieurs reprises déjà. Sans doute plus douée que moi. « Eh. C'est bon. Y a pas de raison pour que tu t'sois planté, Dan. » Je lui souris en retour. J’aimais bien quand elle m’appelais Dan. Comme si nous étions proches depuis toujours. Les noms s’égrenèrent, les uns après les autres, sans que je ne fasse vraiment attention à ce qui se passait autour de moi. Je ne remarquais pas le transfert Altruiste qui n’avait pas été accepté. Je restais les yeux fixés sur cet homme qui lisait la liste, cette fameuse liste, celle qui regroupait tous nos espoirs. Et puis, d’un seul coup, mon nom fut cité. Je restai interdit, avalant la nouvelle alors que l’homme passa déjà à un autre nom. Et puis, je me tournai vers Heather. Elle, elle semblait l’avoir compris plus rapidement que moi. Elle sourit, en grand, béatement, et se penche pour poser sur ma joue un baiser sonore. Je ne compris pas, sur le moment. Et puis, je passai un bras autour d’elle et la serrait. « T’as intérêt d’y être aussi, » lui glissai-je dans l’oreille. Et, enfin, après une interminable attente pendant laquelle mon bras n’avait pas décollé de ses épaules, son nom fut lui aussi cité. Cette fois plus réactif qu’à ma propre annonce, je la repris contre moi. Et la serrai. Oubliant toutes ses années où j’avais été incapable de l’approcher et où je ne faisais que la regarder à distance. Toutes ces années où je la maudissais d’appartenir à mon existence. Désormais, elle allait définitivement en faire partie et bizarrement, c’était ce que j’avais souhaité le plus au monde.
Quelques années plus tard.
Je me penchai vers les résultats que l’on m’avait fait transmettre. Quelque chose clochait. Je travaillais depuis plusieurs mois à l’élaboration d’une nouvelle matière, qui devait imiter la soie d’une araignée. Légère et solide, voilà les mots d’ordre qui m’avaient été donnés. La section urbanistique comptait énormément sur mes avancées et, à vingt ans, j’étais devenu l’un des piliers de ce bureau. Et quand je pensais que quelque chose clochait, quelque chose clochait vraiment. Je soupirai, refermai le dossier d’un coup sec et le calai sous mon bras, direction l’ascenseur, le rez-de-chaussée et les laboratoires d’analyse. Je pianotai sur le tableau de bord de l’ascenseur et, alors que j’allais le refermer, une personne s’avançait pour y pénétrer à son tour. « Oh… Heather… Salut. » Ce fut un sourire bizarre que je lui offris. Gêné, un peu embarrassé. Je faisais de mon mieux pour l’éviter depuis un moment, un long moment. Pourquoi ça ? Eh bien… Que pouvais-je dire à mon ancienne ennemie, devenue ma meilleure amie, de cette obsession maladive que j'avais contractée à son égard ?
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Même la liste de noms, à la Cérémonie du Choix, bien que beaucoup plus longue, était passée plus rapidement que celle-ci. Sûrement parce que six mois auparavant, tu savais où tu allais. L'angoisse que tu ressentais, c'était celle de penser à tous ces regards posés sur toi alors que tu marchais vers l'estrade, ainsi que celle de devoir quitter tes parents et la faction qui t'avais vue grandir. Mais au moins, tu n'étais pas perdue. Tu allais quelque part, tu savais parfaitement où, et rien ne pouvait t'en empêcher. Alors qu'aujourd'hui... Tu ne savais pas. Peut-être que cette nuit, tu devrais dormir sous les railles de la ville, ou dans le coin d'une rue, seule et frigorifiée. Qui sait ? Peut-être t'étais-tu royalement trompée lors de ces tests. Peut-être y étais-tu allée beaucoup trop confiante et beaucoup trop détendue. Et peut-être que la présence du blond à côté de toi t'avais fait échouer. Au moins, lui, il resterait. Vous en êtes certains au moment où le leader prononce son nom, sans s'y arrêter, là où tous les deux, vous vous figez. Lui semble mettre du temps à comprendre. Toi, tu te retrouves soudainement incapable de faire un chignon. Incapable d'empêcher ce foutu sourire de venir se greffer sur tes lèvres. Et incapable de te retenir de poser ses dernières sur la joue de ton voisin. Pourquoi, tu ne sais pas. L'excitation et l'anxiété, sans aucun doute. Tu t'adosses de nouveau contre le dossier de ton siège, bien décidée à finir de nouer tes cheveux. Et tu ne bronches pas alors que tu sens son bras autour de tes épaules, et sa voix au creux de ton oreille. Tu souris, avant de tourner la tête vers lui. « On débarrasse pas d'moi comme ça, tu l'sais. » Il en était passés, des noms. Il s'en était formés, des sourires. Jusqu'à ce qu'à son tour, le tien résonne. Tu pinces les lèvres, te retenant d'aller embrasser le leader qui venait de te rendre officiellement Érudite. Mais même si tu l'avais voulu, tu n'aurais pas pu. Les bras de Daniel t'en aurais empêchée de toute manière. Tu soupires, de soulagement, de bonheur, de fierté, avant de l'enlacer à ton tour. Et alors qu'il ressert votre étreinte, vous écrasez ce lien toxique et malsain qui vous avait liés, toutes ces années. C'était fini. Les paroles qu'ils t'avaient adressées s'invitent, quelque part dans ta tête, résonnent alors qu'il les avait simplement chuchotées. Il semblerait qu’on soit condamnés à être ensemble. Condamnés ? Plus maintenant. Plus jamais.
* * *
Les couloirs des Érudits, tu les connais désormais par coeur. Tu les parcours presque machinalement, faisant claquer tes talons bleus sur les dalles alors que tu rends ici et là. De l'école, à la bibliothèque, à ton appartement dans lequel tu te contentes de manger, dormir, et corriger tes copies. Majoritairement corriger des copies, d'ailleurs. Être institutrice n'avait rien de reposant, contrairement à ce que le plus grand nombre pouvait penser. Surtout quand on ne pouvait s'empêcher de tout voir, de tout analyser, et de tout faire en fonction de la personnalité de chacun. Et c'était d'ailleurs plein de copies que tes bras étaient chargés alors que tu étais sortie de chez toi, après avoir passé les yeux à travers ta fenêtre et t'être dit qu'un peu de temps dehors ne pourrait pas te faire de mal. Tu redresses tes lunettes sur ton nez, replace une de tes mèches châtaigne derrière ton oreille. Tu entends les portes de l'ascenseur s'ouvrir, et tu presses le pas. En moyenne, les utilisateurs de cet ascenseur prenaient approximativement 0,78 secondes pour appuyer sur le bouton de leur étage. Ce qui signifiait que dans 1,65 secondes environ, les portes seraient refermées, et tu devrais attendre qu'il remonte pour pouvoir aller t'asseoir sur une table, dehors. Ou alors sur l'herbe, tu étais encore en train de peser le pour et le contre des deux options. Alors tu accélères, te retrouves presque à courir, manque de perdre un escarpin. Mais tu finis par entrer en trombe dans l'ascenseur, constatant que le bouton du rez-de-chaussée à déjà été enfoncé. Parfait. Tu regardes les portes se fermer avec soulagement, passes une main dans tes cheveux. Et tu te retournes, sursautant, alors qu'une voix s'élève derrière toi. Une voix que tu connais bien. « Daniel ! Tu m'as foutu une de ces trouilles. » Tu lui rends son sourire, espères qu'il ne voit pas tes sourcils se froncer. Quelque chose ne va pas. Quoi, tu ne sais pas. Tu vois simplement que son sourire est bancal. Tu pousses sur tes lunettes, leur évitant de tomber de ton nez, avant d'humecter tes lèvres, et baisses les yeux vers le dossier qu'il a calé sous son bras. Un homme occupé, à ce que tu vois. « Ça fait longtemps. Tu vas bien ? Pas trop débordé ? » Tu parles, parce que tu ne te rends compte que maintenant que ça t'a manqué. Qu'il t'a manqué.